Outre son aspect très esthétique et raffiné, elle possède diverses vertus bienfaisantes et magnétiques. Elle est en effet aimantée et peut servir de pierre directrice, ce qui en faisait une alliée de choix pour les marins qui s’en servaient pour magnétiser leurs boussoles. Ils pouvaient ainsi se diriger plus facilement en mer et ont composé à tracer des cartes pour garder une trace de leurs voyages et de leurs découvertes. Cette pierre marque donc le début de l’ère et de l’art de la cartographie. Dans l’Antiquité romaine, toutes les gemmes de couleur, spinelles comme pierres précieuses, étaient confondues entre elles. Les Romains pensaient qu’il s’agissait de la même pierre et la désignaient sous le nom de carbunculus. Les vertus possédées par le spinelle, comme la protection contre les blessures du corps ou contre les hémorragies, étaient donc indifféremment attribuées au ruby comme au spinella.

Pourpre la plupart du temps, la pierre spinelle se décline également en différentes autres variétés et couleurs, le bleu, qui lui a valu d’être longtemps confondu avec le saphir, mais aussi la lavande, le cobalt, le rose, comme la tourmaline et le parme. Elle tire ses nombreuses variations de teintes de son dosage en chrome, en vanadium et en fer. Cette variété minérale appartient à la famille des oxydes et elle est notée chimiquement Mg Al2 O4. Les gemmes de cette pierre sont habituellement extraites de roches magmatiques ou calcaires et les principales carrières se trouvent à Madagascar, en Birmanie, en Afghanistan, au Vietnam et en Tanzanie. La pierre spinelle se trouve généralement non loin d’un gisement de rubis. En Birmanie, les éclats octaédriques de cette pierre lui valent le surnom de anyan nat thwe, c’est-à-dire “taillé par les esprits”, au contraire de son précieux synonyme qui lui est plutôt “sucé”. Cette pierre étonnante jouit d’une résistance de 8 sur l’échelle de Mohs. Les pierres sélectionnées par des joailliers pour sertir des bijoux sont choisies pour leur grande pureté, sans aucune inclusion. Cependant, il n’est pas rare d’apercevoir quelques jolis cristaux qui ont été piégés à l’intérieur de la pierre. Ils donnent alors un aspect “pétillant”, à la pierre, comme si elle était remplie de petites ailes cristallisées, ressemblant à des cristaux de glace ou de givre, un peu comme dans du saphir.

La beauté de cette pierre en a fait un composant très recherché des trésors royaux et elle est maintenant présente parmi de nombreuses collections. La pierre de 352 carats le Tribut du Monde, qui est exposée dans la salle indienne de Buckingham Palace, en fait partie. Le British Museum compte aussi l’un de ces précieux minéraux. Il s’agit là d’une pierre en forme de galet poli, qui ne fait pas moins de 520 carats ! Elle est originaire de Birmanie et a été volée au XIXe par les troupes anglaises au Palais d’été de l’empereur de Chine. En France, c’est la duchesse Anne de Bretagne qui transmit à la couronne, lors de son mariage avec le roi Charles VIII, deux grosses pierres de respectivement 206 et 121 carats, montées en bijoux. Plus tard, le roi Henri II ajouta au trésor royal un troisième minéral de 241 carats et ces trois pierres furent désignées sous le nom des “trois rubys de la couronne”. Plus tard, le Côte-de-Bretagne fut sculpté en dragon, sur ordre du roi Louis XV et perdit plusieurs carats. Quant aux deux autres pierres, après avoir été apprêtées pour décorer le Garde-Meuble national, elles furent volées et non encore retrouvées à ce jour. Quant à la Russie, elle abrite également plusieurs spécimens rouges puisque la reine Catherine voulut être sacrée d’une couronne ornée d’une pierre de 414 carats. Ce fantastique diadème est maintenant exposé au palais des Armures de Moscou. Enfin, le trésor d’Iran abrite une fantastique collection de pierres pourpres de toutes les tailles, de toutes dimensions, plusieurs centaines, peu à peu amassées au fil des siècles et des conquêtes.